[Il y a quelques années de cela, alors que j'avais peu et parfois pas d'argent du tout, j'avais pensé prendre le large et voir les océans. Chaque fois que je me sens d'humeur chagrine et mélancolique, chaque fois qu'un novembre pluvieux et glacial pénètre mon âme, je sais qu'il est grand temps pour moi de reprendre la mer. Quelque soit le chemin qui vous plaise et que l'on a choisi, neuf fois sur dix, il vous mène à l'eau. Il y a dans l'eau une magie qui attire les Hommes et les conduit à travers plaines et vallées, jusqu'à la mer. La mer, où chaque Homme, comme dans une miroir, retrouve sa propre image.]

Les pieds noircis par cette marche effrénée
De nouveau sur le quai, souvenir des heures passées
Avenir rude mais trop grand pour laisser filer le temps
Je ne sais plus quoi penser de ma frêle hardiesse.
Un coup de sifflet de plus, j’embarque pour le large,
M’élancer dans le rien, le grand tout de mes angoisses.
Sombre et délicieuse perte que celle des repères
Ne plus anticiper mais juste se laisser porter.
VÆRØY !
Vers cette île aux crêtes acérées
VÆRØY !
C’est dans le grand rien que tout me revient enfin,
Au rythme des vagues martelant la roche
Et du flot des pensées qui font valser mes tempes.

VÆRØY !

Somptueuse formation de mes plus lourdes émotions
Je viens gravir ton échine et t’admirer de haut
Le soleil de minuit éclaira mes pas
À travers la brume épaisse de mon cœur
À travers ma nuit intérieure.
Las mais déterminé à vouloir t’apprivoiser,
Entends-tu ma hâte partout résonner ?
Au rythme de mes pas déchaînés.
Aveuglé par ton élégant mystère,
Je ne suis enfin plus sourd à moi-même !
Mais sous ton charme je me sens transcendé,
Arrivé au bout de moi-même.
Je t’ai troqué mes peurs contre le jour salvateur
Plus que quelques heures encore.
À déambuler telle une bête affligée,
Mais baignée de lumière dans ce spectacle divin.
Sans craindre cette lourdeur qui me brisait les reins
Encore, encore, ce n’est qu’à l’extrême des sens
Que je me sens exister.
Les images tournent et reviennent dans ma tête,
Expérience extrême pour l’infatigable que je suis.

Face à l’immensité dans laquelle j’ai chaviré,
Plus que quelques heures encore,
À déambuler telle une bête affligée,
Mais baignée de lumière dans ce spectacle divin,
Sans craindre cette lourdeur qui me creusait les reins.

Et c’est dans la plénitude que je m’éloigne,
VÆRØY !